Il y a un peu plus de cent ans, Romain Rolland écrivait dans le «Journal de Genève», et dénonçait, sans concession, l'absurdité de la Guerre. Ce n'est que le début de la Première Guerre mondiale, et déjà son texte rejette l'idée de victoire, l'appétit de domination, et de «revanche». Il faut prendre de la hauteur, nous disait-il, jusqu'aux cimes. De là haut, seulement, l'on peut faire taire les hurlements d’une humanité irresponsable. C'est cette même lucidité qui infuse tous ses mots; c'est un désir de communion; c'est un idéal humaniste qui lui valut le prix Nobel de littérature — la non-violence.
Romain Rolland (1866–1944) est un écrivain français, et une figure de la non-violence, à l’image de Tolstoï et Gandhi qu’il admire. Il commence une carrière de professeur. Mais lors de la Première Guerre mondiale, il est bouleversé. L'Europe court à sa perte. Il est et demeure en Suisse, pour témoigner de sa neutralité. Il y publie un appel pacifiste, «Au-dessus de la mêlée». Il reçoit le Prix Nobel de littérature de 1915 par l’Académie suédoise. Depuis 1906 il entretient des relations épistolaires avec Alphonse de Châteaubriant, ainsi qu’avec Louis Aragon et Stefan Zweig. Il correspond aussi avec Sigmund Freud, sur le sentiment océanique. Malgré une période où il soutient l’URSS face à un Hitler qui s’impose, il se détourne de la politique, et en 1939 préside le Comité mondial contre la guerre et le fascisme. La correspondance avec Stefan Zweig est d’une importance capitale pour sa philosophie et la littérature. Zweig qualifiera Rolland de «Conscience de l'Europe».